Un baiser.

Je partis en pensant : « Il m’a embrassée », et sûrement de son côté, il pensait : « Je l’ai embrassée », et le premier texto que nous allions peut-être envoyer à un copain ou une copine serait : « Nous nous sommes embrassés ! » Un événement ! Certes, puisque c’était la première fois que cela se produisait, et que cela signifiait bien des choses…

La première nuit, ou les heures qui suivirent, je ne pensais qu’à cela, avec une grande envie que cela se reproduise, une deuxième, une troisième fois. Parfois, je me sentais coupable, parfois victime. Coupable d’avoir trahi mes parents et de leur avoir caché ce que j’étais en train de vivre, de faire, et victime de ne pas être accompagnée dans cette période de ma vie. Parfois, je traitais mes parents d’incompréhensifs, je les culpabilisais de refuser indirectement de fêter avec moi ce bonheur intense, ce changement radical, pas seulement dans ma vie, mais dans mon corps et le fond de mon être aussi. Toute seule, je faisais avec les moyens du bord, et comme bien souvent, je me laissais guider par mon instinct…

Dans toute relation amoureuse, il y a une petite aventure, qui pourrait avoir lieu des jours après, parfois des semaines et parfois des mois… une petite aventure, un petit peu délicate, surtout quand c’est pour la première fois. C’est comme si l’on montait dans une petite barque, sans rames et que l’on se laissait emporter au gré du courant. Mes pensées allaient dans tous les sens, et parfois je me sentais grande, responsable, je faisais ce que je voulais et comme il me semblait bon, et d’autres fois, je souhaitais que mes parents soient près de moi. Je continuais seule dans la barque, le courant m’envoyait vers le rivage gauche, et dès que je m’apprêtais à descendre, à poser les pieds sur la terre ferme, il faisait un tour, il me dirigeait vers l’autre rivage… 

Pourquoi me cacher ? Étais-je vraiment coupable ? Quel lourd fardeau je portais silencieusement, et quelle honte m’envahissait quand je regardais l’un de mes parents droit dans les yeux ! Fort heureusement, ils ne pouvaient lire  dans mes pensées… Quelle honte… C’est vrai, il m’arrivait plusieurs fois de leur dire avec des regards et avec d’intenses émotions : « Je l’ai fait ! » Ils auraient vite compris de quoi il s’agissait… Mais comment auraient-ils réagi ? Je ne craignais pas qu’ils me grondent ou qu’ils me disent : « Monte dans ta chambre » ou « Tu n’iras plus dormir chez ta copine », mais ce que je redoutais le plus, c’était l’indifférence envers ce que je leur racontais, ce que je faisais, un « Ah, oui » sans rien de plus, alors que c’était énorme, très important pour moi.

Nous faisions comme si de rien n’était et nous le fîmes longtemps… Les choses évoluèrent : ce qui était au début, un événement, n’était devenu pour nous qu’une conduite naturelle. Personne ne savait ce que nous partagions, sauf quelques copains qui devinèrent malgré notre prudence, ce qui se passait entre lui et moi. Pleins de fougue, nous épanchions notre amour l’un envers l’autre, sans modération, ni précaution, et nous retardions, chaque fois, la décision de le révéler à nos parents, de peur d’entendre la phrase culte : « Et tes études, tu en penses quoi ? » ou « Et tes études, tu en es où ? », comme si ce que nous vivions n’avait aucune importance… Mal informés et retardant le moment d’en parler, les choses pouvaient dériver vers de mauvaises conséquences et entraîner un impact négatif sur notre équilibre psychique et physique…

Un beau jour, nous décidâmes de les mettre au courant et advienne que pourra… Nos parents sont présents depuis notre naissance, nous ont appris à parler, à faire nos premiers pas, comment tenir une cuillère, comment s’asseoir sur une chaise et même comment tenir un crayon, pour bien nous construire. Ils doivent être là pour nous instruire et nous apprendre ce qui est bien pour nous et ce qui ne l’est pas…

  • Auteure : Rmili Fatiha
  • Date de parution : 17/04/2018
  • Thème : L’adolescence/ L’amour
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