Jacob et ses trois enfants

Jacob était un père travailleur, dévoué, sage et avait une seule ambition : venir en aide à son prochain. Selon lui, rien ne valait mieux que de faire ou de représenter le bon dieu sur Terre.

Jacob après une longue vie, remplie de bonnes actions, fut atteint d’une maladie incurable. Il demeura pendant des mois alité, et ceci ne l’empêcha pas d’accueillir des gens qui venaient de loin, lui demander conseil ou le prier de s’interposer entre des gens en conflit. La douleur dans le corps, le sourire aux lèvres, il invitait tous ceux qui sont en désaccord, et tentait de les réconcilier.

Un beau jour du mois d’octobre, le père Jacob fit convoquer ses trois garçons, leur demanda de verrouiller toutes les portes de la maison, de fermer les volets des fenêtres et de s’assurer que personne ne les écoutait discrètement ; puis leur confia : « Chers enfants, ma fin est pour bientôt. J’ai été très généreux avec les autres, mais je ne vous ai laissé manquer de rien. Et je vous lègue un trésor… » Surpris, les trois adolescents se regardèrent, « comment ce père qui avait le cœur sur la main, qui se levait la nuit pour aller s’assurer que les habitants du village voisin étaient en bonne santé, ce père qui allait visiter sous des pluies torrentielles des orphelinats, et leur laisser des bourses pleines de pièces d’or, pouvait-il encore épargner des biens pour ses enfants ? » Ils baissèrent la tête pour permettre à leur père de continuer. « Le trésor, vous allez bien sûr le partager entre vous, mais c’est votre mère qui gardera le secret, jusqu’à ce que vous soyez adultes. Et pour cette tâche, qui lui est attribuée, elle a droit à une part de chacune des vôtres… » Emporté par l’étonnement, le benjamin interrompit son père : « Mais père, le trésor sera partagé équitablement. Nous sommes quatre héritiers ! Maman aura sa part, comme chacun d’entre nous ! » Le père continua avec une très faible voix : « Vous me prouvez que vous ne saurez le partager, et pour cette raison, il faut que toi, Nadiv, tu aies un doctorat en mathématiques, et toi Moshé, un doctorat en sciences juridiques, et toi mon petit Nahat, un doctorat en économie. Avec vos doctorats, je saurai que mon trésor ne sera pas éparpillé à tort et à travers, et que votre mère, qui veillera sur chacune de vos parts, prendra ce qui lui revient de droit… » À ces mots, le père Jacob expira son dernier souffle.

Les années s’écoulèrent, et les trois garçons n’eurent qu’une seule envie, décrocher leur doctorat pour pouvoir profiter de ce que leur avait cédé leur père. Impatient, le cadet demanda un jour à sa mère ce que renfermait ce trésor ; elle répondit,  avec son calme coutumier, qu’il contenait des armes en or qui ne leur permettraient pas d’être riches seulement, mais aussi d’avoir une bonne réputation et d’être sollicités partout où ils iraient. Les propos de la mère ne firent que booster les jeunes hommes dans leurs études. En attendant la fin de leur parcours scolaire, la mère Gilberte lavait et repassait leur linge, rangeait leur chambre, leur préparait de succulents plats, enfin elle veillait sur eux, comme s’ils étaient encore petits, pour leur permettre de se concentrer sur leurs livres.

Après plusieurs années d’acharnement, les trois hommes (ils ont bien grandi) eurent chacun un doctorat ; en mathématiques pour Nadiv, en économie pour Moshé et en sciences juridiques pour Nahat. Ils filèrent dire à leur mère qu’ils avaient bien réussi, et qu’il était temps de découvrir le trésor tant attendu. Ils ne pensaient qu’à vendre les armes en or et profiter de l’argent. La mère Gilberte leur expliqua que le père Jacob l’avait enfoui aux pieds du pommier dans le fond du champ. Les frères, chacun muni d’une pelle, arrivèrent au pied de l’arbre et commencèrent à creuser, à creuser et à creuser. Enfin ils remontèrent un petit coffret, et furent surpris. « Comment notre père avait-il pu mettre des armes en or dans un petit coffret ? » Le benjamin malgré son étonnement dit : « Nous devons donner à notre mère une part de chacune des nôtres, comme était le souhait de notre défunt père ». Puis, il ouvrit le coffret, y tira une lettre. Ils restèrent un moment sans voix, hésitants, puis l’aîné la déplia. Il lit : « Je vous laisse trois armes irréfutables, un doctorat en sciences juridiques, un doctorat en mathématiques et un doctorat en économie. À votre maman, je laisse trois hommes bien instruits. Avec ces trois doctorats qui sont des armes en or, vous serez à mille lieues de la délinquance, de la violence. Vous serez protégés de la pauvreté, et toute personne vous vénérera, car vous n’avez pas une arme dans la main, mais ″dans le cerveau″. Vous avez de quoi faire avancer tout un peuple. Vos diplômes sont des armes inestimables, ce sont des armes en or qui pourront un jour trouver un substitut à la guerre actuelle ; cette guerre qui sème à chacun de ses passages, la terreur, la famine et la maladie. Pensez à votre maman qui a passé sa vie  à s’occuper de vous. Elle a droit à une partie de vos revenus, et de cette manière, elle aura trois parts et non une seule ? »

Les trois jeunes gens comprirent qu’encore une fois, leur père, dans toute sa sagesse, leur avait légué ce qu’il y a de plus précieux : l’espoir d’un monde meilleur…

 

  • Auteur : Rmili Fatiha
  • Illustration : Hamza 
  • Date de parution : 19/03/2017
  • Thème : L’instruction/ L’apprentissage
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